<< Retour aux articles
Image

Création par ordonnance d'un droit d'opposition aux brevets d'invention

Affaires - Immatériel
13/02/2020
Un droit d'opposition aux brevets d'invention est créée par l’ordonnance n° 2020-116 du 12 février 2020.
Cette ordonnance, prise sur le fondement de l’article 121 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (« loi PACTE »), vise à permettre aux tiers de demander par voie administrative la révocation ou la modification d’un brevet d’invention.

On rappellera que le brevet confère à son titulaire un monopole temporaire d’exploitation sur l’invention qui en est l’objet. Dans l’état actuel du droit, dès lors qu’il a été délivré par l’institut national de la propriété industrielle, le brevet ne peut être annulé que dans le cadre d’une action judiciaire. La nécessité de recourir à la voie judiciaire pour faire valoir ses droits de propriété industrielle constitue un frein pour les acteurs économiques les plus faibles, notamment les petites et moyennes entreprises, les start-ups ou les inventeurs indépendants.

On retiendra que le droit d’opposition prévu par l’ordonnance crée une procédure administrative simple et peu coûteuse, susceptible d’éviter une procédure judiciaire en cas de litige peu complexe. Ce nouveau dispositif permet ainsi un alignement du droit français sur les pratiques d’autres offices de propriété industrielle en Europe et dans le monde.

On relèvera que la création du droit d’opposition aux brevets d’invention s’inscrit dans le cadre des actions de modernisation du système français de propriété industrielle prévues par la loi du 22 mai 2019 dont l’objectif est de conforter la qualité des brevets français, et ainsi de renforcer l’attractivité de la France pour le dépôt de titres de propriété intellectuelle.

Un grand nombre de dispositions du Code de la propriété intellectuelle est en conséquence modifié.

On retiendra plus spécialement qu’après l'article L. 613-23 nouvellement rédigé sont insérés les articles L. 613-23-1 à L. 613-23-6 rédigés dans les termes suivants :
« Art. L. 613-23-1. - L'opposition ne peut être fondée que sur un ou plusieurs des motifs suivants :
1° L'objet du brevet n'est pas brevetable aux termes des articles L. 611-10, L. 611-11 et L. 611-13 à L. 611-19 ;
2° Le brevet n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter ;
3° L'objet du brevet s'étend au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée ou, lorsque le brevet a été délivré sur la base d'une demande divisionnaire, l'objet s'étend au-delà du contenu de la demande initiale telle qu'elle a été déposée.
L'opposition peut porter sur tout ou partie du brevet délivré.

Art. L. 613-23-2. - Le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle statue sur l'opposition au terme d'une procédure contradictoire comprenant une phase d'instruction, dans les conditions définies par décret en Conseil d'Etat.
La décision du directeur général de l'Institut a les effets d'un jugement au sens du 6° de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution.
L'opposition est réputée rejetée si le directeur général de l'Institut n'a pas statué dans le délai, fixé par décret en Conseil d'Etat, qui court à compter de la date de fin de la phase d'instruction mentionnée au premier alinéa.

Art. L. 613-23-3. - I. - Au cours de la procédure d'opposition, le titulaire du brevet contesté peut modifier les revendications de ce brevet sous réserve que :
1° Les modifications apportées répondent à un des motifs d'opposition mentionnés à l'article L. 613-23-1 soulevé par l'opposant ;
2° Les modifications apportées n'étendent pas l'objet du brevet au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée ou, lorsque le brevet a été délivré sur la base d'une demande divisionnaire, n'étendent pas son objet au-delà du contenu de la demande initiale telle qu'elle a été déposée ;
3° Les modifications apportées n'étendent pas la protection conférée par le brevet ;
4° Les revendications modifiées soient conformes aux dispositions des articles L. 611-10, L. 611-11, L. 611-13 à L. 611-19, L. 612-5 et L. 612-6 et que leur rédaction réponde aux conditions de forme définies par décret en Conseil d'Etat.
II. - Au cours de la procédure d'opposition, le titulaire du brevet contesté peut également en modifier la description et, le cas échéant, les dessins sous réserve que :
1° Ces modifications visent à répondre au motif d'opposition mentionné au 2° de l'article L. 613-23-1 soulevé par l'opposant ;
2° Les modifications apportées n'étendent pas l'objet du brevet au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée ou, lorsque le brevet a été délivré sur la base d'une demande divisionnaire, n'étendent pas son objet au-delà du contenu de la demande initiale telle qu'elle a été déposée.

Art. L. 613-23-4. - Lorsque le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle fait droit à l'opposition pour l'un des motifs mentionnés à l'article L. 613-23-1 soulevé par l'opposant, le brevet peut être :
1° Révoqué en tout ou partie ;
2° Maintenu sous une forme modifiée compte tenu des modifications apportées par le titulaire en cours de procédure en application de l'article L. 613-23-3.
Lorsque le directeur général de l'Institut rejette l'opposition, le brevet est maintenu tel que délivré.

Art. L. 613-23-5. - Chacune des parties à la procédure d'opposition supporte les frais qu'elle a exposés, à moins que le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle ne décide d'une répartition différente de ces frais, dans la mesure où l'équité l'exige, et dans la limite d'un barème fixé par arrêté du ministre chargé de la propriété industrielle.

Art. L. 613-23-6. - La décision de révocation a un effet absolu. Les effets des décisions statuant sur l'opposition rétroagissent à la date de dépôt de la demande de brevet.
« Lorsqu'une décision statuant sur l'opposition révoque partiellement le brevet, elle renvoie devant l'Institut national de la propriété industrielle le titulaire afin que ce dernier demande la modification du brevet pour se conformer à cette décision. Cette demande n'est toutefois recevable que si la décision statuant sur l'opposition n'est plus susceptible de recours.
Le directeur général de l'Institut a le pouvoir de rejeter cette demande de modification du brevet pour défaut de conformité à la décision de révocation partielle
  » 
Source : Actualités du droit